Loin de toute autonomie, et dans le refus d'une création fermée sur elle-même, Sébastien Rien adopte un principe d'ouverture et de collaboration comme moyen de nourrir ses processus de création. Ses recherches puisent aux différents champs du savoir, tels que la biologie, la sociologie, la philosophie et la cybernétique alors que les formes qu'il génère embrassent l'installation, la photographie, l'art sonore, la performance, le graphisme et l'écriture. Produire en relation se présente comme une des grandes lignes directrices de son oeuvre. En ce sens, Rien a constitué - en collaboration avec une équipe pluridisciplinaire composée par Sébastien Biset, Antoine Boute, Leslie Mannès et Emmanuel Pire - l'EOR (Entreprise d'Optimisation du Réel). Les activités de ce groupe adoptent des formes variables, selon le propos, les situations d'implantation et les stratégies retenues. Les dispositifs produits, systématiquement conçus comme des environnements multimédias, transgressent les frontières et décloisonnent les disciplines.
Ce projet de Dissipation apparaît comme une nouvelle manière de confronter et de synthétiser (d'opérer la synthèse formelle et conceptuelle de) ces deux éléments que sont le naturel et l'artificiel. Le nuage est le thème sur lequel nous souhaitons travailler. Il jouit dans l'histoire de l'art d'une fonction changeante selon les époques. Du Moyen Age jusqu'à la fin du XIXe siècle, le nuage hante le ciel de la peinture occidentale. Moins qu'un motif descriptif, le nuage constitue un élément de la sémiotique picturale, un graphe dont les fonctions varient avec l'époque. A l'origine utilisé à l'imitation des machines de théâtre, pour faire apparaître le sacré dans le réel (ascension du Christ, visions mystiques), il joue un rôle plus ambigu à la Renaissance, au moment où le modèle perspectif assure la régulation: le nuage vient alors masquer l'irreprésentable infini, en même temps qu'il le désigne, assurant ainsi l'équilibre paradoxal d'une institution picturale intimement liée aux conditions de la science. Le nuage aujourd'hui évoque mille et une choses et permet une ouverture en termes d'interprétation, qui, loin d'être figée, s'actualise dans le regard de chacun. S'il rassure certains (en tant qu'élément naturel, céleste), il en inquiète d'autres (évoquant pollution, combustion, catastrophe). Enfin, la « représentation » du nuage par le langage numérique se voit augmentée d'une réalité purement physique: celle de la fumée projetée par le dispositif. Les éléments naturels et artificiels se fondent en cette installation. Peu à peu, le dispositif est occulté par la fumée qui devient un écran, brouillard englobant, environnement. Le dispositif disparaît au profit de l'expérience vécue.

OPTIMUM PARK est un dispositif plastique et performatif composé à partir d'une série d'installations indépendantes (ci-après dénommées "stations"). Ces stations sont reliées entre-elles par un réseau informatique (le Système). Le Système coordonne un ensemble d'actions hétérogènes opérées par le public pendant toute la durée de l'expérience. De fait, dès leur entrée, toute une série de données du public sont encodées par des stewards afin que le Système puisse connaître le profil de chaque sujet. Un identifiant se présentant sous la forme d'un badge est distribué à chacun. Cet identifiant sert le Système qui peut à partir de lui s'adresser à un individu particulier en connaissant son sexe, sa taille, son âge approximatif, etc. Dès lors, le Système s'exprime aux membres du public au travers d'une voix de synthèse diffusée par une sonorisation classique. Une série d'écrans affichent des informations sur le cours de la performance, des données relatives aux scores des individus, de courtes séquences animées symbolisant les passages entre niveaux ainsi que des messages ponctuels sensés perdre le public. Le nombre de ces EC varie en fonction des typologies de lieux d'accueil. L'ensemble de l'expérience se déroule sous le couvert d'une prétendue optimisation. Le Système et la communication autour du projet s'y réfère continuellement sans pour autant proposer une explication relative à la nature de la dite optimisation. Au sein d'OPTIMUM PARK, l'optimisation reste un terme aussi vague et connoté que la notion de progrès auquel il est lié. Le mot est continuellement tourné en dérision par la nature même des actions effectuées par le public et les stewards. En cela réside une grande part de la dimension critique présente au sein de l'oeuvre.
